Qu’est-ce que la méthode Montessori ?
Maria Montessori, à l’origine de cette pédagogie fut la première femme diplômée de médecine en Italie. Au cours de sa carrière elle ouvrira les premières écoles consacrées aux enfants des quartiers défavorisés de la capitale, où elle développera sa nouvelle méthode d’enseignement. Cette pédagogie se veut respectueuse de la démarche naturelle de l’enfant, en l’immergeant dans un environnement adéquat et nécessaire à son développement.
Elle se base sur l’idée que l’enfant passe par des périodes critiques de développement durant lesquelles il est plus sensible à certains apprentissages, tout en tenant compte des différences interindividuelles. En effet chaque enfant présentera des appétences particulières pour certains apprentissage mais pas forcément au même moment.
En France cette pédagogie a d’abord connu un essor, par la création d’écoles privés souvent onéreuses et donc réservées à un petit nombre. Pourtant des changements s’opère et de plus en plus d’enseignants d’écoles publiques s’emparent de cette méthodologie. Actuellement c’est en école maternelle que ce changement s’effectue.
En pratique : comment se présente cette méthodologie ?
En cycle 1 (école maternelle), les journées sont très ritualisées. Par exemple tous les matins commencent par la date du jour, la météo, les présences/absences. Dans la méthodologie Montessori, beaucoup d’affichages sont utilisés, il peut par exemple s’agir de photos de chaque élève avec un tableau d’affichage représentant la maison et un autre l’école, leur permettant de faire les présences mais également de comprendre qu’ils changent de lieu. Tous ces rituels ne sont pas anodins et permettent à l’enfant d’intégrer les règles de bases du vivre ensemble.
Avant de débuter une activité, l’enseignant demande aux élèves de rappeler les règles à respecter pendant les activités. Sur les meubles et dans différents casiers on retrouve le matériel, il peut s’agir de lettres rugueuses pour se familiariser avec le tracer ou de plateaux de transvasement pour développer la motricité et l’attention, etc. On trouve également des tapis individuels permettant à l’élève de délimiter son espace de travail. Dans ces classes, ni bureau pour l’enseignant, ni mobilier ou fenêtre inaccessible à la vue, tout est pensé pour être adapté à l’enfant. Dans cet environnement on ne rencontre pas de jouets d’imitation, en effet selon les principes Montessoriens l’enfant fait « pour de vrai ». A l’aide de cahier l’élève s’autoévalue et renseigne ses réussites. Afin de s’assurer du processus de réalisation, l’enseignant observe et questionne l’enfant sur la façon dont il a procédé. En fin d’activité, les élèves se réunissent et, avec l’aide de l’enseignant, ils font un retour sur leurs stratégies en expliquant aux autres élèves comment ils ont procédé.
Cette pédagogie place donc l’élève en tant qu’acteur majeur de son apprentissage. Cette volonté de positionner l’enfant au cœur du système éducatif, tout en tenant compte de son individualité, découle notamment de changements sociétaux. En effet sous l’impulsion par exemple en France de Françoise Dolto, la parole est donnée à l’enfant, puis en 1989 la Convention Internationale relative aux droits de l’enfant reconnait les droits des mineurs. Face à ces mutations sociétales et malgré les réformes successives, l’école « traditionnelle » et notre système d’éducation s’est rapidement retrouvé à bout de souffle, ne permettant plus aux enseignants de répondre aux attentes institutionnelles, ils se tournent vers d’autres formes de pédagogie.
Une nouvelle logique de l’évaluation ?
En effet au cours des diverses réformes de l’éducation nationale, les attentes institutionnelles ont changé. Dans la logique d’évaluation, nous sommes passés d’une vision sommative (par la note) souvent perçue comme stigmatisante et dévalorisante à une évaluation par compétences, positive et bienveillante valorisant les progrès des élèves.
Positive, dans le sens où elle est informative, afin de réduire les émotions négatives (comme la peur) et de favoriser un rapport positif aux erreurs qui doivent être considérées comme une étape dans la progression vers la réussite.
Et bienveillante, à ne pas comprendre comme gentille, laxiste ou moins exigeante mais comme permettant d’encourager et de valoriser l’élève dans le but de prendre confiance en ses capacités, d’avoir un fort sentiment d’efficacité personnel et de mobiliser sa motivation (Hadji, Bentolila, & Meirieu, 2016).
L’idée étant d’abandonner une logique de classification des enfants, et de s’orienter résolument vers l’observation et le prélèvement de ce qui est à l’œuvre chez les enfants, en lâchant prise sur la notion d’écarts à la norme. On affranchit donc les enseignants du formalisme et des protocoles sophistiqués en leur faisant confiance pour évaluer par l’observation.
C’est dans ce sens que deux nouveaux outils ont été mis en place à la rentrée 2016. Il s’agit du carnet de suivi et du livret de réussite. Cela permet à l’enseignant d’informer les parents de l’évolution de leur enfant dans leur parcours d’apprentissage mais également de réguler ses enseignements, de s’adapter et d’informer les futurs enseignants de possibles difficultés. Pour l’enfant, ce livret permet d’expliquer à ses parents ses réussites et les stratégies mises en place.
En ce sens la pédagogie Montessori, semble être en adéquation avec les attentes institutionnelles. Effectivement, elle respecte le développement de l’enfant pour favoriser ses apprentissages. « Les apprentissages se font dans la durée grâce un entrainement répété » (Adad, 2017). L’élève est donc dans une situation face à laquelle il est prêt et pour laquelle il manifeste de l’envie. Cette pédagogie permet également de tenir compte de l’individualité de chaque enfant, en facilitant la gestion de l’hétérogénéité et en en faisant une source d’enrichissement. En effet, observer un/une camarde réaliser une activité peut susciter l’envie chez d’autres élèves. Elle permet à l’élève de prendre conscience de ses apprentissages et de ses progressions.
Bien que grandement plébiscitée, cette pédagogie nécessite tout de même un engagement et un changement de posture de l’enseignant avec une adhésion aux valeurs Montessoriennes. D’autre part, le coût du matériel, le manque de formation des enseignants à l’évaluation par l’observation, mais aussi le manque de légitimité de ces nouvelles formes d’évaluations peuvent constituer des freins à cette pédagogie. De façon générale, elle reste tout de même grandement plébiscitée et les résultats observés par certains enseignants peuvent faire rêver. Mais que nous dit vraiment la science ?
Point sur la recherche :
Les travaux en sciences cognitives ont rapidement appuyé le rôle fondamental de l’action dans la construction de nos connaissances. En effet, dès 1897, Dewey initie le hands-on learning (apprendre par l’action). Il montre que les connaissances s’enracinent dans l’expérience de la personne. Les recherches en sciences cognitives ont également mis en avant que les processus cognitifs sont intimement liés à nos expériences sensorielles (vue, ouïe, odorat, toucher, goût) et à nos actes moteurs (Barsalou, 1999). Ce qui sera plus tard confirmé par l’imagerie cérébrale (Goldberg, 2006; Rizzolatti & Fabbri-Destro, 2008).
Ces travaux amènent à penser que ce n’est donc pas en demandant à un enfant d’apprendre X choses dans un but Y qu’il aura les comportements adaptés. Il convient plutôt de le mettre en posture d’agir.
De façon plus spécifique à la pédagogie Montessori, un article du journal « Approche Neuropsychologique des Apprentissages chez l’Enfant » publié en 2015 (Dénervaud & Gentaz) présente un résumé des études scientifiques qui ont évalué les effets cognitifs et socio-émotionnels de la pédagogie Montessori sur le développement psychologique des enfants. Ces études ont été menées dans différents pays entre 2000 et 2014. Les résultats obtenus tendent à montrer que la méthode Montessori peut avoir des effets bénéfiques sur les compétences socio- émotionnelles, le potentiel créatif mais aussi sur les compétences motrices des élèves.
Et après ?
Au-delà du cycle 1, une étude (Dohrmann, Nishida, Gartner, Lipsky, & Grimm, 2007) a comparé deux groupes de lycéens ayant fini l’école obligatoire publique (États-Unis) : traditionnelle ou Montessori. Une attention particulière a été portée à l’élaboration de groupes homogènes (niveau socio-économique, culturel, genre, âge et moyennes scolaires). Sur un total de 402 étudiants, il en ressort que les élèves issus du groupe Montessori ont obtenu des scores significativement plus élevés aux tests mathématiques et scientifiques. Cependant, aucune différence n’a été observée pour les autres tests.
Bien que ces résultats soient encourageants, les scientifiques restent prudents car l’intégration d’enfants dans des écoles Montessori découle souvent d’un choix parental, ce qui dénote une sensibilité familiale à la pédagogie. Des études complémentaires restent donc nécessaire.
De façon globale, les études s’accordent sur l’importance de l’environnement scolaire et de la pédagogie sur le développement neurocognitif, affectif et social de l’enfant. Aujourd’hui, la pédagogie Montessori tient une place de plus en plus importante dans le paysage éducatif français, mais elle semble se limiter au cycle 1. Pourtant, Maria Montessori a au départ initié cette pédagogie auprès d’élèves pré- adolescents (9-11 ans) confrontés à un système éducatif rigide et incapable de s’adapter de façon très originale.
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